mardi 19 mars 2024

Reprenons... Neuf ans après, un nouveau titre.

Ce blog est resté en plan depuis février 2015. Vers 2019, je me suis aperçu que je n'avais même plus la main sur les contenus, un changement intervenu chez Google, la disparition du réseau social Google Plus, impossible de me reconnecter aux pages. Et puis ce dimanche, avant-hier, idée vague de créer un nouveau blog, manipulations hasardeuses autour de Blogger : tout-à-coup l'atelier de publication s'ouvre sur mon écran ; et tout est là, comme je l'ai laissé en 2015. J'en ressens comme une bouffée jubilatoire. Une incitation fortuite, il faut la saisir. 

Lettre K comme Kant,
"on ne pose pas n'importe quels problèmes"

L'adresse du blog reste inchangée, c'est la règle : pour-sortir-du-jugement... J'ai pourtant eu envie de modifier le titre. Ce sera jusqu'à nouvel ordre : Deleuze et le système du jugement. Que Deleuze soit dans le titre,  déjà, c'est mieux. Un titre plus complet devrait être : "chercher des moyens pour en finir avec le système du jugement". C'est la formulation exacte du problème récurrent de toute son œuvre que donne Deleuze dans ses entretiens de l'Abécédaire, à la lettre K comme Kant. Un peu trop long pour un titre. Mais enfin s'agit-il d'en finir, ou de sortir ? d'en finir avec le système du jugement, de sortir du jugement, du système du jugement ? La formule de "sortir" n'est pas employée par Deleuze. Elle convient pourtant très bien à son plus gros livre, Mille plateaux, 640 pages, 1980. Le thème de la fuite y prend beaucoup d'importance. Alors pourquoi pas : insister sur ce mouvement de sortir, et d'en sortir... C'est ce que j'ai fait lors de la première vie de ce blog, de 2013 à 2015, tous mes efforts concentrés sur Mille plateauxMais cette idée de sortir, de partir, de voyager, court le risque de dissimuler d'autres manières de fuir, du type devenir imperceptible ou passer entre les gouttes. Et puis, elle s'applique moins bien aux autres livres et textes de Deleuze, en dehors de Mille plateaux

Mais enfin direz-vous, s'il s'agit de sortir et d'en finir, un titre court et plus exact aurait dû être : Deleuze contre le système du jugement. Deleuze et le système du jugement, il y a ambiguïté. On pourrait croire que Deleuze, comme philosophe, a élaboré un système personnel qui sur ce blog prendrait le nom de système du jugement. Eh bien, je cours le risque. Il suffira d'aller un tout petit peu plus loin que le titre pour voir qu'il s'agit d'en finir, de "chercher des moyens pour en finir avec le système du jugement, et pour y mettre autre chose à la place". Cette autre chose n'a pas encore de nom, ou bien elle en a plusieurs possibles, proposés ici et là par Deleuze — par exemple "système physique de la cruauté", dans un texte très important du recueil Critique et clinique, 1993. De toute façon, il s'agit encore ici de considérations toutes nominales, nous ne savons pas encore ce que Deleuze entend par tout cela, jugement, doctrine du jugement, système du jugement, et parfois doctrine du jugement de Dieu, ou jugement de Dieu tout court, qui pèserait réellement sur la Terre, pas seulement une doctrine dans nos têtes, mais une instance qui nous ligote par exemple à la forme organique du corps humain. Les pages de ce blog veulent justement éclairer tout ça. 

"Deleuze explique Guattari,
 signé toi."

Je vais essayer de procéder plus lentement, moins par symboles et par allusions que dans la première vie du blog. En dessous du titre, j'ai ajouté : Destivère explique Deleuze. Signe d'une volonté pédagogique. La formule peut passer pour prétentieuse — oui, oui ! On en a marre de rien comprendre, va falloir oser, va falloir parfois trancher. Dans le livre Dialogues, 180 pages, 1977, soi-disant écrit avec Claire Parnet, Deleuze donne la formule suivante : "ce serait Deleuze explique Guattari, signé toi". C'est dire que Deleuze, par ailleurs connu pour sa difficulté et ses séquences d'obscurité, ne dédaigne pas d'expliquer. À un autre endroit, il a formulé ce conseil : "ne pas trop s'expliquer". Ces formules pourraient nous mener loin, puisque les termes expliquer, impliquer, compliquer, et même perpliquer qui n'existe pas, prennent chez Deleuze, du moins dans certains de ses livres, une importance philosophique et même ontologique de première grandeur. Ontologique signifie qu'ils concernent toutes les choses en général et la façon dont elles s'imbriquent les unes dans les autres, dans toute expérience que nous en avons. Nous y reviendrons, forcément. Retenons que Deleuze a pu pour son compte "ne pas trop s'expliquer", mais qu'il n'a pas dédaigné d'expliquer Guattari par exemple, et de faire signer une partie de cette explication par quelqu'un d'autre, à savoir son amie Mlle Parnet, comme ça, pour des raisons qui les regardaient. 

Ici, ce sera donc Destivère explique Deleuze. Rien de définitif, ni de monolithique, il y a toujours des explications, les unes parfois senties comme meilleures que les autres. Depuis la première vie de ce blog, depuis son endormissement en 2015, j'ai gagné un peu en assurance. Deleuze sera toujours difficile, mais enfin, on trouve des explications. On arrive à stabiliser certaines explications de détail et surtout une explication d'ensemble. L'idéal serait bien sûr d'arriver à faire avec lui ce qu'il a fait avec Nietzsche, avec Spinoza. Il a écrit Nietzsche et la philosophie, 230 pages, 1964, dans lequel il explique Nietzsche. Il a écrit Spinoza et le problème de l'expression, 330 pages, 1968, dans lequel il explique Spinoza. Voilà, moi, sous une forme moins contrainte que celle du livre, j'essaie ici d'expliquer Deleuze. 


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